Zoom libraire

 16/11/2021

Même si sa librairie-presse n’est plus située directement le long de la grand route, il est difficile de louper le nouvel emplacement du magasin de Philippe Morren à la sortie de Wavre. Flags de la Loterie et panneaux orange flash dirigent les yeux des passants vers Gastu Press version 2.0.

Au-dessous d’une salle de fitness d’une enseigne bien connue et également… orange, se présente son commerce sur pas moins de 250 m². Un déménagement que ne regrette pas le moins du monde le premier intéressé, bien au contraire, ni ses clients qui semblent lui donner raison !

 

Stagner ou se bouger

Quand votre librairie-presse a dix-sept ans, qu’elle devient un peu vétuste et que vous êtes arrivés au maximum de l’espace disponible, vous vous dites qu’il est peut-être temps de réagir. Ajoutez à cela le gros problème qu’est le manque de parking. Quand vous êtes situé le long d’une grande route, c’est clairement handicapant.

Heureusement, cela ne se ressentait pas (encore) au niveau du chiffre d’affaires, mais il stagnait. Malgré la crise sanitaire, il restait en positif et était en équilibre depuis deux-trois ans. Mais c’est dangereux, car on ne stagne pas pendant une éternité et arrive un moment où l’on commence à descendre. La seule solution était donc de réagir avant que cela se produise !

Deux options s’offraient à moi : soit ne rien faire et prendre ma pension à soixante ans, soit me lancer dans une nouvelle aventure. Si je prenais ma pension, mon épouse, qui travaille avec moi, aurait dû se trouver un autre métier donc cela a aussi pesé dans la balance. Finalement, j’ai fait le choix de déménager pour avoir une librairie-presse plus grande. Une fois que j’aurai soixante-cinq ans, mes beaux-fils parlent de reprendre mon commerce. Et s’ils changent d’avis d’ici-là, je pourrai le remettre sans crainte.

 

Une première expérience

Je suis entré dans le monde de la presse car à la base je travaillais pour un patron qui n’avait aucun respect pour son personnel et cela ma dégoûté. Un soir, à la maison, j’ai ouvert le Vlan et j’ai vu qu’il y avait une librairie-presse à remettre dans les environs. Tout de suite, je me suis dit que c’était pour moi. Je suis allé voir la librairie de Gastuche qui faisait 33m² et je me suis renseigné auprès d’un fiscaliste pour avoir une étude de rentabilité et des projections.

J’ai repris le magasin il y a vingt-et-un ans, le premier septembre 2000 très précisément. Pour gagner de l’espace dans le commerce, je laissais mes boissons dans la voiture pour stocker autre chose à la place comme la papeterie. J’y suis resté deux ans et demi, puis le local à côté était à louer et me permettait de multiplier ma surface par cinq sans doubler le loyer, je n’ai pas hésité longtemps.

Nous avons fait appel à plusieurs sociétés pour refaire le magasin dont Klinkers. Ils n’étaient pas les moins chers, mais leur projet était à mes yeux le plus beau. Nous avons donc rénové le magasin qui mesurait environ 140m². Au début, nous nous demandions ce qu’on allait mettre dedans pour le remplir et en quittant, on ne voyait pas comment on allait pouvoir tout disposer dans le nouveau local !

 

Viser plus grand

Comme je l’expliquais, le bâtiment qui abritait la librairie-presse n’était plus de première jeunesse et nous devions refaire la toiture. Pour ce faire, j’aurais de toute façon dû fermer le temps des travaux. Un peu plus loin au bord de la grand route, il y avait cet ensemble de surfaces commerciales avec un grand parking, je me suis dit que cela pouvait constituer une belle évolution pour mon magasin.

Quand nous avons emménagé ici, le 22 juin 2021, le bâtiment avait seulement quatre ans donc il était pour ainsi dire neuf. Beaucoup de gens m’ont dit que comme je n’allais plus être le long de la route, j’allais perdre une partie de ma clientèle, mais cela ne m’a pas fait peur. Nous nous sommes juste déplacés de cinq cents mètres, nous avons des drapeaux à rue, une pancarte orange avec le nom du magasin et normalement une enseigne Gastu Press est prévue sur le bâtiment. En plus de cela, le vieux bâtiment à l’entrée de la zone commerciale va être détruit l’année prochaine et celui qui prendra sa place sera agrémenté d’un portique qui reprendra les noms des sociétés. Tous ces éléments combinés font qu’en venant de Wavre les gens auront une belle visibilité.

Pour revenir sur les clients, la majorité des habitués sont restés lors du déménagement et comme nous nous sommes rapprochés de l’entrée de Wavre, le bouche à oreille fonctionne plutôt bien. Sans oublier le parking gratuit et la surface commerciale à proximité qui contribuent au fait que les habitants des environs ne craignent pas de se déplacer.

Je pense que mon heure d’ouverture constitue un autre avantage. Nous sommes ouverts de 5h à 18h en continu du lundi au vendredi et de 5h à 14h le samedi (à la base l’horaire du samedi était différent, mais pendant la crise du COVID-19, j’ai décidé d’ouvrir jusque 14h et quand on a recommencé à l’horaire plein, les clients avaient pris l’habitude de venir plus tôt, donc nous l’avons gardé). Il arrive fréquemment que des élèves qui se rendent à l’école à Wavre passent chez moi avant les cours car il leur manque du matériel.

 

Travail d’équipe

Quand nous sommes arrivés dans l’emplacement actuel, nous avons dû faire quelques travaux pour avoir l’intérieur que nous voulions. Par exemple, nous avons abattu un mur parallèle à la façade qui n’avait plus lieu d’être et, au fond du magasin, nous avons construit une cloison pour créer une réserve à part.

Comme ce fut le cas pour mes premiers travaux, j’ai de nouveau fait appel à la société Klinkers. Elle m’a proposé un projet que j’ai un peu retravaillé pour mettre ma petite touche. Cela m’a aussi permis de mettre six mètres de gondoles double-face en plus. Tous mes meubles sont sur roulettes donc c’est facilement modulable.

Au vu de la taille du magasin et de l’afflux de clients certains jours (ndlr : en moyenne 400 clients journaliers), nous avons trois caisses et deux machines de la Loterie nationale. Nous travaillons à trois le matin (avec mon épouse et une employée) et à deux l’après-midi, ce qui nous permet facilement de jongler entre les différentes caisses. C’est la première année que nous en avons autant et je pense que cela nous sera fort utile en fin d’année ou même lors d’un vendredi treize !

 

Le livre avant tout

Notre produit phare est clairement le livre. Dès que nous avons repris la première librairie-presse, nous l’avons développé avec AMP livres et Didier Berger, sur deux mètres de gondole. Malgré l’arrivée d’un nouveau programme informatique chez eux qui a mis à mal le livre (jusqu’à son abandon), nous avons ouvert des comptes chez les différents distributeurs de livres belges, ce qui nous a permis de continuer à proposer ce produit et même de nous lancer à fond dedans.

Aujourd’hui, le livre représente plus ou moins 40% de mon magasin, c’est vous dire à quel point il fonctionne chez nous ! Même pendant la crise, c’était clairement le produit qui a le mieux tourné. Un de ses gros avantages, c’est évidemment de bénéficier d’un droit de retour.

Quand on a commencé, nous ne savions pas trop ce qui allait tourner, donc j’ai fait confiance aux délégués. Maintenant, nous avons évolué selon les demandes et surtout nous avons travaillé les familles qui fonctionnaient pour les faire évoluer. Actuellement, nous sommes arrivés à un assortiment complet : livres d'histoire, romans, bouquins de science-fiction, mangas, bandes-dessinées, etc. Comme nous bénéficions de beaucoup de place, nous arrivons à faire tourner toutes les familles plus que correctement.

D’ailleurs, je pense que le livre c’est l’avenir. J’ai l’impression que le livre numérique et la presse digitale commencent à stagner tout doucement. Toujours avoir les yeux rivés sur une tablette n’est quand même pas très bon pour la santé. Certes, il faudra quelques années parce que la presse numérique a fait un bond en avant incroyable en peu de temps, mais je pense que d’ici cinq ou six ans, la presse papier va revenir en grâce. C’est pour cela qu’il est important pour nous de garder notre coin journaux et magazines, qui se maintiennent.

 

Importante papeterie

Mon autre cheval de bataille, c’est la papeterie. C’est aussi un produit que nous avons commencé à travailler dans notre première librairie-presse et qui représente un peu plus de 25% du magasin actuel.

Notre choix a été de ne pas proposer des produits de bon marché comme le font les grandes surfaces. Nous avons préféré travailler les grosses marques et, une fois que vous le faites, il ne faut pas les mélanger avec des produits de moins bonne qualité, sinon les clients vont s’y perdre. Au début, ils allaient acheter les produits d’appel dans les grandes surfaces, puis ils revenaient chez nous pour les classeurs et cahiers de qualité par la suite car ce qu’ils avaient acheté dans un premier temps n’avait pas tenu le coup. Maintenant, ils viennent chez nous directement pour trouver de la qualité et ils sont satisfaits !

Nous possédons un meuble « écriture » qui reprend les grandes marques comme Stabilo ou Pilot. J’y tenais vraiment beaucoup, car la papeterie attire tout de suite l’œil quand elle est disposée dans des meubles adaptés. Jusqu’à présent, mon chiffre d’affaires me prouve que c’était le bon choix.

 

Carterie et produits d’appel

Nous travaillons la carterie depuis toujours. Nous avons six mètres de cartes avec sept ou huit tourniquets et deux mètres de meuble. Cela fonctionne très bien aussi et je fais plus du double du chiffre d’affaires par rapport à quand mon magasin était de l’autre côté.

Nous avions déjà pas mal de carterie, mais les tourniquets étaient un peu éparpillés dans le magasin alors qu’ici ils forment un bloc donc cela rend mieux. Je travaille en exclusivité avec Hallmark et un tout nouveau stock. Je travaillais déjà avec eux avant donc ils m’ont repris mon ancien stock et tout rempli. C’est du compte ferme, mais ils reprennent tout ce qui est saisonnier.

En plus de cela, nous proposons évidemment les différents produits d’appel que sont la presse, le tabac, les jeux de hasard (Loterie et une borne de paris sportifs), la confiserie et un peu de boissons. Nous ne travaillons actuellement pas les colis, car il faut beaucoup d’espace et j’ai vu des collègues être surchargés de colis pendant la crise du COVID-19. Je pense que si je me lance là-dedans, il me faut quelqu’un dédié aux colis à plein temps, ainsi qu’un espace alloué. Ce n’est pas dans les priorités actuelles, mais la porte n’est jamais fermée car vous ne pouvez pas uniquement travailler les familles à gros rendements, on a besoin des produits d’appel.

 

Du beau livre pour Noël

Pour les fêtes de fin d’année, nous avons prévu de rentrer le beau livre donc un peu plus « haut de gamme » ou plus spécifiques en termes de thèmes comme la cuisine, les voitures, le voyage, etc. Pendant l’année, nous proposons déjà ces titres, mais uniquement via des commandes des clients. Ce sera donc l’occasion de les faire découvrir directement en magasin.

Bien évidemment, nous allons décorer notre librairie-presse et proposer les traditionnelles pochettes et sapins de la Loterie Nationale. Je vais aussi essayer de mettre en place une grosse cagnotte au Lotto et à l’EuroMillions. Quand nous étions dans notre ancien magasin, cela n’avait jamais intéressé les clients car ceux qui veulent jouer gros préfèrent jouer tout seul, mais j’ai envie de réessayer.

 

Un JLP médiatique

Nous avons participé au Jour du Libraire Presse et donnions un Subito à un euro à tous les clients majeurs plus les petits goodies habituels.

Cette année, Vers l’Avenir et RTL sont venus faire un reportage sur notre librairie-presse. Grâce au journal, j’ai vu beaucoup de monde, dont des clients que nous n’avions plus vus depuis un petit moment. Par exemple des gens qui n’étaient plus venus chez nous depuis le déménagement et qui sont passés nous dire bonjour.

L’article est paru le vendredi 22 octobre, celui qui a suivi le gain de l’EuroMillions, et nous avons mieux travaillé ce jour-là qu’une semaine avant ! Tout cela « juste » avec un article dans la presse papier, vous voyez qu’elle a encore de l’avenir !

 

Article rédigé par Colin Charlier dans le cadre du Prodipresse Mag n°107 de novembre 2021.